Usine Van Nelle de Rotterdam

A Schiedam, dans la banlieue ouest de Rotterdam, aux Pays-Bas : l’usine Van Nelle, construite entre 1926 et 1931 par les architectes Johannes Brinkman et Leendert van der Vlugt.

Au tournant du 20e siècle, Van Nelle, une compagnie hollandaise déjà centenaire, transformant tabac, café et thé, est en pleine expansion. Son usine dans le vieux-port de Leuvehaven ne peut plus répondre à ses besoins, mais sa situation urbaine nous permet pas de l’agrandir.

En 1924, on décide de construire une nouvelle usine, là où il y a de la place, en dehors de la ville. Le site a été choisi à cause du grand canal qui le borde et de la proximité de la voie ferrée Paris-Amsterdam, avec laquelle est prévue une liaison, qui ne sera jamais réalisée. De l’autre côté, de la voie un nouvel ensemble de logements à bon marché pourra accueillir les ouvriers.

Usine Van Nelle

F.Eveleens / CC BY (https://creativecommons.org/licenses/by/3.0)

Création d’architecte dans son environnement

L’usine est alignée sur le canal dont elle dépend pour l’acheminement des produits bruts qui arrivent tous à Rotterdam par la mer. C’est un ensemble complexe de plusieurs dizaines de milliers de mètres carrés. En bord de canal, des entrepôts. Parallèles à ceux-ci, les ateliers de transformation du tabac, du café et du thé, une centrale pour la vapeur et l’énergie, le bâtiment des expéditions, des garages, et des ateliers de maintenance, une cantine pour les ouvriers et enfin, face à la voie ferrée, le bâtiment de l’administration et de la direction.

Johannes Brinkman et Leendert van der Vlugt

L’usine est l’oeuvre des architectes Johannes Brinkman et Leendert van der Vlugt, mais la véritable arme de l’entreprise c’est le patron de Van Nelle, Kees Van der Leuw, un jeune businessman fasciné à la fois par le modèle américain et l’architecture moderne. Van Nelle doit sa prospérité à la transformation et au commerce de produits coloniaux : le tabac, surtout à priser et à rouler, le café et le thé.

Dans l’ancienne usine, les trois produits partageaient le même bâtiment. Dans la nouvelle usine, chacun aura sa propre section adaptée à ses besoins. De l’extérieur, cela se traduit par une différence de hauteur. La section tabac, dont le traitement est le plus complexe, est haute de huit étages. La section cafés, de six et le thé de trois seulement.

Les produits sont traités selon des méthodes toutes nouvelles, importées des Etats-Unis, fondées sur la mécanisation, la simplification des trajets, la coordination des gestes, le chronométrage. Tout l’espace est organisé pour produire plus et plus vite. Les trajets se font en ligne droite, la ligne de l’efficacité maximale. Cette logique linéaire produit un bâtiment tout en longueur, sans détour ni fioriture.

Un travail pour mieux gérer la lumière

Une autre innovation américaine influe sur le plan de l’usine, elle est conçue comme une “daylight factory”, c’est à dire éclairée autant que possible par la seule lumière du jour. On voit mieux, on produit plus. Les ingénieurs en déduisent la largeur des bâtiments : 17 mètres maximum, pour que les grandes fenêtres situées de part et d’autre puisse éclairer tout l’intérieur. La forme de l’usine, étroite et étirée, est ainsi dictée par des impératifs de la production.

La construction elle-même est un exploit d’ingénierie. Le terrain est un polder, une terre gagnée sur la mer. Des pieux de béton armé de plus de 20 mètres de long, coulés sur place et enfoncés dans le sol marécageux par des marteaux pilons à vapeur, servent de fondation. Une solution innovante testée ici pour la première fois.

Les poteaux en béton armé qui forment le squelette de l’usine sont eux aussi d’un genre nouveau en Europe, à tel point que les architectes n’ont pas osé les faire figurer dans la demande de permis de construire, de peur qu’elle ne soit rejetée. Dans la construction en béton pratiquée couramment à l’époque, des poteaux droits supportent des poutres sur lesquelles vient reposer le plancher de l’étage suivant. Au plafond, ces poutres constituent autant d’obstacles : passage des câbles, de la lumière.

Les poteaux de l’usine Van Nelle laissent au contraire le plafond totalement libre. On les appelle les poteaux champignons, à cause de la forme évasée de leur sommet. Leur secret, c’est de ne faire qu’un avec le plancher qu’il porte. Un coffrage et une armature unique, et une même coulée de béton, permettent de fabriquer un complexe homogène, auto-plancher d’un seul tenant où les poutres ne sont plus nécessaires. C’est plus économique à la construction, plus performant et surtout mieux adapté aux besoins de l’usine.

Aux Etats-Unis, les automobiles Ford ont adapté ce système dès 1913. A Van Nelle, comme chez Ford, l’absence de poutres permet de gagner de la lumière et d’accrocher facilement au plafond la machinerie des chaînes de transport. Aujourd’hui, tout cela a disparu, l’activité a cessé en 1995. Seules quelques grandes salles gardées en l’état donnent une idée de ce qu’étaient les ateliers de l’usine.

Restauration et affectation nouvelle des bâtiments

Les autres espaces, magnifiquement restaurés, cloisonnés et adaptés aux besoins d’aujourd’hui, accueillent cabinets d’architectes, ateliers de design, entreprises de marketing. Sur chacun des poteaux repeints en blanc courent de bas en haut une élégante ligne noire. Ce n’est pas un effet décoratif, c’est une rainure qui permettait et permet encore d’accrocher tout ce qu’on veut sur les poteaux, sans qu’on ait à trouer le béton.

La nouvelle usine veut également incarner les grands principes de l’architecture moderne. Patron atypique, Kees Van der Leuw compte parmi ses amis l’architecte américain Richard Neutra, dont il finance les expériences, et l’architecte allemand Walter Gropius, dont il a visité plusieurs fois le bâtiment du Bauhaus, à Dessau. Traduisant ses influences, la façade transparente de l’usine exhibe de façon spectaculaire l’alignement verticale des poteaux, qui projettent une image de finesse et de légèreté malgré le gigantisme du bâtiment.

Création et inspiration Bauhaus

Mais dans cette alliance du taylorisme et du Bauhaus, c’est toujours l’appareil de production qui a le dernier mot. Les poteaux peuvent doubler de taille, sans aucune considération esthétique, pour peu que les machines de l’atelier de torréfaction du café l’exigent. La façade est faite de verre, ce qui à l’époque commence à être courant, et de métal, ce qui l’est beaucoup moins. Le métal remplaçant la paroi de briques, et peint de couleur aluminium pour renforcer l’effet, donne au bâtiment la lueur d’une machine de son temps.

Faite d’éléments préfabriqués et simplement accrochée au squelette de béton, c’est une façade rideau, une mince peau sans fonction porteuse. Les plans prévoyaient à l’origine des fenêtres horizontales. Soucieux du moindre détail, Kees Van der Leuw les a fait remplacer par des fenêtres verticales. Il ne voulait pas que des lignes horizontales viennent gâcher aux ouvriers la vue du dehors.

L’utilisation d’éléments préfabriqués fait gagner un temps considérable à la construction. La façade est facile à monter, et à démonter, on peut l’ouvrir n’importe où en fonction des besoins de l’usine pour y faire rentrer, par exemple, ces étonnantes passerelles dont la diagonale surprend dans cet univers où règne l’angle droit. Et de fait, ces passerelles, par où les produits finis partent vers le magasin d’expédition, sont le résultat d’une improvisation. A l’origine, le magasin d’expédition devait être flanqué de deux grandes tours que deux passerelles à angle droit reliaient à l’usine, tandis que deux autres passerelles, toujours à angle droit, allaient jusqu’au bord du canal. Mais l’usine a été mise en service avant que les tours ne soient construites, et la production a exigé ces quatre passerelles provisoires.

Près d’un siècle plus tard, elles sont toujours là. La crise économique de 1929 a obligé Van Nelle à réduire ses ambitions. Du projet initial, ne reste que ces supports attendant des passerelles qui ne viendront jamais, et les diagonales, à l’origine un bricolage improvisé, sont devenues rapidement une des images les plus symboliques de l’architecture industrielle des temps modernes, comme le montre ce photomontage des années 30.

Nouvelle gestion des espaces et de la lumière

La division des ateliers de transformation en trois unités est soulignée par trois escaliers dont le volume est littéralement sorti des bâtiments, ce qui permet de relier les ateliers entre eux, si la production l’exige. Contrairement aux bâtiments qui vont du plus grand au plus petit, les escaliers vont du plus léger au plus massif. Un effet de composition destiné à rééquilibrer la perception de l’ensemble. Le premier escalier est transparent et à peine saillant, de façon à ne pas gâcher l’effet de la grande façade vitrée telle qu’on la découvre en arrivant sur le site. Verre sur verre, escalier et façade ne semblent faire qu’un. Les seules parties en maçonnerie sont rejetés sur le pignon. Elle abritent les sanitaires, où la transparence n’est pas de mise. Accrochée à la façade, la cage de l’escalier semble suspendue dans le vide, à tel point qu’il a fallu l’aborder à l’intérieur d’un grillage métallique pour rassurer les ouvriers souffrant de vertige.

Les impératifs de la production laissent place ici au plaisir de la lumière, à l’élégance des céramiques et des chromes. Les dépenses supplémentaires exigées par les finitions, écrit Kees Van der Leuw dans un mémorandum adressé aux architectes, sont justifiées, même quand elles ne présentent pas un avantage immédiat. La forme du bâtiment ne doit pas découler des seules nécessités techniques, il faut aussi qu’on ait plaisir à y travailler.

La perception de second escalier est perturbée par la présence des passerelles, venues se mettre en travers, mais au-delà de cet accident, ce qui est frappant, c’est la volonté des architectes de varier les figures, d’associer différemment la maçonnerie et le verre pour rompre la monotonie des alignements. Alors que sur le second escalier la cage vitrée est à l’avant et la maçonnerie à l’arrière, le rapport est inversé avec le dernier escalier où, au contraire, c’est la cage vitrée qui est à l’arrière.

Le bloc maçonné des sanitaires, pour une fois mis en avant, est porté par de grandes colonnes recouvertes de céramique noire. Les architectes profitent de l’espace vide créé par cette surélévation pour y emboîter, comme dans un jeu de construction, un autre volume, une des deux salles de contrôle électrique de l’usine. L’emboîtement des volumes permet de faire coexister deux échelles. Les colonnes monumentales sont à la taille de la grande usine, tandis que le volume glissé en dessous, qui fait aussi office d’entrée, est tout simplement à taille humaine.

A l’intérieur, surprise, il n’y a pas un escalier mais deux. Deux escaliers indépendants où se croisent les regards, mais pas les trajets. Un escalier réservé aux femmes, l’autre aux hommes. La raison officielle de cette ségrégation ? Chaque escalier dessert les toilettes de son genre et le dédoublement empêche que quiconque se trompe de porte.

Kees Van der Leuw

Kees Van der Leuw attache une très grande importance aux questions d’hygiène, tant pour des raisons d’efficacité que par souci du bien-être de ses employés, pour lesquels ces installations sont un luxe totalement nouveau. Tout l’équipement sanitaire est importé des Etats-Unis, arrivant par le même bateau qui achemine tabac et cafés. Américaines, aussi, ces fontaines permettant aux ouvriers de se désaltérer ou cet ingénieux portier automatique. La porte, soulevée par une rampe, se referme toute seule sous son propre poids.

A l’avant de l’usine, le bâtiment de la direction est clairement séparé des ateliers, tant par l’espace que par la forme. Son autonomie et sa taille traduisent la nouvelle importance prise par les bureaux, l’organisation et la planification du travail, mais ici les architectes, libérés de la tutelle des ingénieurs de la production, peuvent jouer à loisir avec les courbes et les angles aigus des volumes décalés. Ce jeu a toutefois un sens. Le décalage des volumes cherche à traduire la dualité du bâtiment de la direction, qui fait office d’interface entre le monde du dehors et celui de l’usine. Le volume en déport réglé sur l’usine est strictement perpendiculaire au bâtiment de fabrication. Le volume sur lequel il repose est réglé sur le dehors, aligné sur la voie de chemin de fer. Le volume courbe relie les deux.

A l’intérieur, la courbe correspond à une mezzanine réservée aux directeurs et à leurs invités, qui surplombe un plateau ouvert où travaillent des centaines d’employés. Le volume est impressionnant par sa hauteur, que rien ne justifie, sinon la volonté d’épater les visiteurs. C’est la vitrine de l’entreprise, où le travail des employés est donné en spectacle. Le modernisme est au service de l’image. Face à la voie de chemin de fer, tout le front de l’usine, considéré comme sa façade principale, est traité comme la proue d’un grand navire, destiné à frapper l’imagination des passagers de l’express Paris-Amsterdam.

Dès les premières études, un mémorandum de Kees Van der Leuw précise qu’il faudra envisager de ce côté une grande enseigne lumineuse. Vue du train, écrit un journaliste de Rotterdam, on dirait un aquarium géant, ou mieux encore, un laboratoire où on crée l’homme nouveau, tandis que pour Le Corbusier, qui la visite en 1930, l’usine Van Nelle est le plus beau spectacle des temps modernes, le poème de la lumière, le lyrisme de l’impeccable, l’éclat de l’ordre.

Disposition des lieux et gestion des espaces

La courbe qui accueille le visiteur dès l’entrée du site a un côté aimable. Plus stricte, la façade tournée vers l’intérieur est animée par la saillie d’un escalier qui rivalise d’élégance et de transparence avec les escaliers de l’usine. Les circulations se font à vue. Tout ici est transparent, remarque encore Le Corbusier. Chacun ici voit et est vu travaillant. Transparente aussi, la passerelle qui relie le bâtiment de la direction aux ateliers. Cette passerelle aboutit à un escalier en colimaçon, transparent également, mais d’un côté seulement.

Du côté des ateliers, l’escalier est enfermé dans une coque de métal aux allures futuristes, qui le protège du regard des ouvriers. Impossible de voir si quelqu’un l’emprunte. L’escalier débouche sur un couloir qui court tout le long de l’usine. Les chefs peuvent ainsi circuler en toute discrétion pour éviter, dit-on, que leurs déplacements ne distraient inutilement les ouvriers. Le couloir est semi-enterré. De l’extérieur, on ne voit que ses étroites fenêtres sous une couverture métallisée aux allures de blindage. Le couloir fait profil bas, on le remarque à peine au pied de la grande façade.

L’usine est un espace sous surveillance. Admirant la cantine des employés, Le Corbusier souligne à juste titre l’innovation sociale, la propreté et l’ordre de ce qu’il appelle “La tribu des abeilles travailleuses”, mais nous voyons aussi l’homme qui arpente l’allée, surveillant le temps du repas, comme si le réfectoire n’était qu’un prolongement de l’atelier. Il en va de même avec la position de travail idéale, qui améliore la santé des employés et leur productivité. Kees Van der Leuw a rapporté des Etats-Unis des modèles de chaises ergonomiques, qu’il teste sur des cobayes en maillot, un sac en papier sur la tête pour protéger leur anonymat. Pour les fournisseurs et les clients, la priorité va au confort. Ainsi, conçues par le designer hollandais Gispen, des banquettes avec chauffage central incorporé aussi élégantes que confortables.

Mais c’est dans l’usage de la couleur que la structure hiérarchique de l’entreprise s’incarne de la façon la plus étonnante. Selon un code formulé aussi bien par Kandinsky que par des doctrines ésotériques, auxquelles Kees Van der Leuw adhérait, chaque couleur incarne une valeur : ainsi, le bleu, couleur céleste, représente les valeurs spirituelles les plus élevées et c’est pourquoi il est omniprésent dans les escaliers de la direction. A l’opposé, le noir et le jaune, couleurs terrestres, sont du côté de la matière. Ce sont donc les couleurs dominantes des bâtiments de la fabrication, où la matière est transformée. Pour les architectes, cela devient un effet d’écriture et une signalétique. Le noir des colonnes souligne leur monumentalité, tandis que le jaune indique les entrées du bâtiment.

Ce code peut se transformer en jeu de piste. Dans l’entrée du premier escalier des ateliers, on a la surprise de découvrir une colonne de couleur turquoise, couleur noble qui a priori n’a rien à faire ici. Les initiés peuvent voir cette piste turquoise se poursuivre dans l’escalier, d’étage en étage, comme une ligne qui mène au lieu le plus prestigieux et le plus privilégié de toutes les usines, juché sur le toit du bâtiment tabac : une rotonde d’acier et de verre, d’allure martiale. On dirait la passerelle de commandement d’un grand navire de guerre. C’est un belvédère d’où Kees Van der Leuw et ses invités de marques peuvent admirer la ville et le port au loin. C’est une fantaisie de plusieurs tonnes, un caprice de patron milliardaire, une faute pour les tenants d’un fonctionnalisme stricte, qui la surnomment la bonbonnière. Mais c’est aussi une signature, la marque personnelle apposée par Kees Van der Leuw sur l’usine qui est son œuvre, tout autant que celle de ses architectes.

Une solution simple, économique, voire rationnelle

La rotonde lui sert de retraite privée, il y passe souvent la nuit à contempler le ciel et s’abandonner à ses méditations ésotériques, stimulé peut-être par l’étonnant motif du revêtement du sol qui, comme l’usine elle-même, associe lignes droites et lignes courbes. Au milieu de la pièce trône un étrange objet de métal. Fait d’acier recourbé, peint de couleur aluminium comme tous les éléments métalliques de l’usine, il sert à la fois de rambarde à l’escalier du vestiaire et de radiateur. Une solution simple, économique, on aurait presque envie de dire rationnelle, mais l’addition des deux fonctions fait naître un objet unique, une sculpture.

C’est la singularité de ce lieu, où tout semble aller de soi, et en même temps, parler d’autre chose. Un banal escalier en colimaçon et sa rampe évoquent, par le jeu des lignes et des matières, la spirale d’un coquillage ou d’une galaxie, tandis qu’un peu de peinture bleue tachetée de blanc suffit à transformer en nuit étoilée le mur sur lequel est posée le cadran transparent de l’horloge du salon de thé. Il y a le temps cosmique et le temps de l’usine, les deux ne coïncident pas.

En 1931, Kees Van der Leuw, ayant construit la fabrique de ses rêves, part pour Vienne et devient psychanalyste. L’entreprise Van Nelle prospère jusque dans les années 60, puis c’est le déclin. Un jour, des ouvriers partent pour ne plus revenir. En 1995, l’usine ferme définitivement ses portes. Sauvée de la destruction par une poignée d’amoureux, elle est aujourd’hui plus proche du rêve originel de ses créateurs que de la réalité d’un outil industriel encrassé par l’usage. Elle doit sa survie à la force de son image, mais cette image a changé de sens. Conçue comme un projet d’avant-garde tourné vers l’avenir et porteur de progrès, l’usine est désormais un monument témoignant d’une époque révolue, celle d’une modernité optimiste fondée sur l’alliance du beau et de l’utile, un paradis perdu.